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Les effets liés à l’âge du méthylphénidate sur le système dopaminergique humain chez les enfants vs adultes TDAH (Trouble Déficit d’Attention/Hyperactivité), Un essai clinique randomisé


Introduction

Le chlorhydrate de méthylphénidate est le médicament le plus fréquemment prescrit pour le traitement du Trouble Déficit d’Attention/Hyperactivité (TDAH). Il réduit efficacement les symptômes d'inattention, l'hyperactivité et l'impulsivité chez presque 80% des enfants atteints de TDAH. Le méthylphénidate augmente la concentration extracellulaire de la dopamine (DA) dans le cerveau en bloquant les transporteurs de DA au niveau des synapses. Sa sécurité à court terme a été documentée lors de nombreuses études, et son efficacité est parmi les plus élevées de tous les psychotropes. Cependant, malgré son usage répandu chez les enfants et les adolescents, on ne sait que peu sur ses effets durables sur le système dopaminergique.

Les effets du méthylphénidate sur le développement du cerveau ont jusqu'ici été seulement étudiés chez les animaux sains de sexe masculin avec des temps d'élimination courts. Des données plus récentes indiquent que les médicaments psychotropes affectent le cerveau d'une manière différentielle qui dépend de l'âge à l'exposition.

L'objectif principal de cette étude est d'évaluer les effets du traitement par méthylphénidate à long terme sur la fonction dopaminergique chez les enfants et les adultes atteints de TDAH. Les auteurs ont évalué la fonction dopaminergique en utilisant l'imagerie par résonance magnétique pharmacologique (phIRM), une technique non invasive puissante pour étudier la fonction dopaminergique in vivo. En raison des taux augmentés de DA, ils ont émis l'hypothèse d'une augmentation du débit sanguin cérébral (DSC) en réponse au traitement par méthylphénidate chez les enfants pendant 4 mois (après arrêt d’une semaine), mais sans de tels effets durables chez les adultes.

Methods

Il s'agit d'un essai multicentrique sur 16 semaines, randomisé, en double aveugle, vs placebo sur l'utilisation du méthylphénidate et une évaluation aveugle au final chez des patients TDAH jamais traités par stimulants. L'effet de l'âge sur la réponse du DSC à une augmentation du DA et le résultat clinique global ont été évalués à l'aide du phIRM chez les enfants et les adultes atteints de TDAH, assignés au hasard soit à un placebo ou à un traitement actif avec la méthylphénidate, au départ et après 1 semaine de l'arrêt.

50 garçons (10-12 ans) et 49 hommes (23-40 ans) jamais traités par stimulants ont participé à cette étude. Le recrutement des participants a eu lieu par référencement de plusieurs centres TDAH dans la région d'Amsterdam aux Pays-Bas entre le 1er Juin 2011 et le 15 Juin 2015. Des critères d'inclusion supplémentaires comportent le sexe masculin, l'âgé de 10 à 12 ans ou 23 à 40 ans, et la non mise sous traitement stimulant. Tous les enfants et adultes inclus répondaient aux critères stricts du TDAH selon le DSM-IV.

Ont été exclus de cet essai :

  • Les patients aux troubles psychiatriques concomitants de l'axe I et nécessitant un traitement avec des médicaments au début de l'étude ;
  • Ceux avec des antécédents de maladie neurologique ou médicale majeure ;
  • Ceux aux antécédents de traitement clinique avec des médicaments qui influent sur le système dopaminergique (pour les adultes avant l'âge de 23 ans), comme les stimulants, les neuroleptiques, les antipsychotiques et les agonistes D2 et D3.
Les auteurs ont utilisé la phIRM pour évaluer la réponse du DSC à une augmentation du DA par le méthylphénidate. Cette épreuve comporte 2 sessions, une avant et une 90 minute après l'administration orale de 0,5 mg/kg de chlorhydrate de méthylphénidate. Les moyennes des valeurs du DSC dans la matière grise de 3 régions d'intérêt (le striatum, le thalamus et le cortex cingulaire antérieur) ont été utilisées pour l'analyse statistique.

Pour évaluer l'effet du méthylphénidate sur le développement du système dopaminergique, des tests t appariés ont été utilisés pour évaluer le changement individuel de la réponse rapide du DSC après la prise de méthylphénidate du départ par rapport la fin (Δi DSC) pour les 4 groupes séparément. Pour tester l'interaction entre l'âge, le traitement et le Δi DSC, une analyse de variance (ANOVA) a été effectuée avec l'âge et le groupe de médicaments comme facteurs. Pour les caractéristiques au début et les résultats cliniques, un test de Fisher exact a été utilisé pour l'analyse des données catégoriques, avec un rapport de cotes comme estimation de la taille de l'effet, et le test t et ANOVA ont été utilisés pour les variables continues, avec des distributions normales et êta partiel au carré (ηp2) comme estimation de la taille de l'effet.

Résultats

Parmi 131 personnes recensées pour admissibilité, 99 patients répondaient aux critères du DSM-IV pour le TDAH, 50 participants ont été randomisés pour le méthylphénidate et 49 pour le placebo. 16 semaines de traitement par méthylphénidate ont augmenté la réponse du DSC à la méthylphénidate dans le thalamus (différence moyenne, 6,5 ; IC à 95%, de 0,4 à 12,6 ; P = .04) des enfants âgés de 10 à 12 ans, mais pas chez les adultes ni dans le groupe placebo. Dans le striatum, cette différence était significative chez les enfants, mais pas chez les adultes (différence moyenne : 7,7 ; IC à 95%, de 0,7 à 14,8; P = .03).

Discussion

Les auteurs ont étudié si l'âge module les effets du traitement prolongé du méthylphénidate sur le système dopaminergique humain. Après 4 mois de traitement par le méthylphénidate, ils ont constaté des augmentations significatives de la réponse du DSC à l'augmentation du DA dans le striatum et le thalamus 1 semaine après la fin de l'essai chez les enfants jamais traités, ce qui suggère des changements durables dans le système dopaminergique. Cet effet était spécifique aux enfants parce que le traitement placebo a échoué à montrer un tel effet dans les deux groupes d'âge, et le traitement actif avec le méthylphénidate chez les adultes n'a eu aucun effet non plus.

Cette constatation est conforme aux essais phIRM précliniques qui ont signalé des augmentations durables du DSC régional dans plusieurs régions du cerveau riches en DA chez les jeunes rats traités avec le méthylphénidate.

Un atout majeur de la présente étude est sa conception, de telle sorte que les effets des facteurs de confusion (par exemple, l'âge et le sexe) sont négligeables.

Conclusions

Les auteurs confirment les données précliniques et démontrent les effets âge-dépendants du traitement par méthylphénidate sur le circuit striato-thalamique humain de la dopamine extracellulaire. Compte tenu de son intérêt pour la société, ces données justifient des réplications dans de grands groupes avec un suivi plus long.

  • Dr Benbrahim Mohammed
  • Service de psychiatrie
  • CHU Hassan II Fès
  • Le 30/10/2016

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